Publié par Rolling Stone

THEO LAWRENCE & THE HEARTS - Road trip (2/4)

NASHVILLE (Tennessee)


Beaucoup ont enregistré dans cette ville popularisée par Johnny Cash dans les années 50 et siège social des guitares Gibson : d’Elvis Presley, en passant par Bob Dylan, Johnny Hallyday ou Lana Del Rey. C’est dire tout le poids encore intact de Nashville. « Moi même, je suis parti avec ma guitare... Je la prends toujours : on ne sait jamais quand surgit l’inspiration. Je préfère donc m’encombrer, avec mon smartphone comme seul enregistreur. » À raison : Theo y écrira trois morceaux, dont “My Sunshine Is Dead“ gravé sur l’album. En partance pour la capitale de la country music, le reste du sac a tout du hobo : deux t-shirts et un pantalon à laver chaque soir dans le lavabo...

Sur place, un premier choc : « rien ne semble avoir changé : ce sont les mêmes buildings qu’il y a 150 ans ». Pour sûr : l’industrie musicale y a explosé lorsque les compagnies d’assurance du coin ont souhaité passer plus facilement leurs pubs sur les ondes radios en produisant des artistes de la région. Pas étonnant qu’une partie des édifices soit encore aux mains de ces sociétés... Ainsi, « tous les bars possèdent leur salle de concert et nombreux sont les open mic permettant aux talents de se faire découvrir ». Avec en contraste : « des rues désertes, notamment parce que Nashville est très étendue et que même les pauvres ont une voiture. » [ndla : la légende veut aussi que les habitants soient dans l’un des 250 studios de la ville]

Mais c’est comment Nashville ? « Un musée à ciel ouvert, dont le glaçage du gâteau a des arrière-goûts de colorant industriel », tranche Theo. En cause : la musique, devenue sport local, sacrifie selon lui son authenticité en puisant dans un même tronc commun. « Tous se réclament, par exemple, de John Prine... » Entre deux poulets frits chez Hattie B's, une soupe aux haricots noirs et trois orgies à Mas Tacos Por Favor, Theo s’échappe vers la Record Booth du label Third man, une machine de 1947 gravant un vinyle de 2 min. après enregistrement sur place. « J’ai chanté un titre inédit, écrit quand j’étais jeune ; et un présent sur un des trois E.P. que l’on a sorti entre 2016 et 2017. Pour faire comme Elvis et l’offrir à ma mère… Mais l’objet est tellement précieux que je n’ai pas pu m’y résoudre… »
Pas de Jack White dans les locaux donc, mais la rencontre avec son bras droit, Ben Swank, qui propose une visite impromptue après la projection 16 mm du documentaire The Seventh Fire... Une fois libéré et encore hébété, la suite joue les ping-pong entre les honky-tonks comme le Station Inn ou le concert de William Tyler au Belcourt theatre, le Ryman auditorium (fief du “Grand Ole Opry“, mythique émission de radio depuis 1925 !) et les studios légendaires de RCA (Chet Atkins, The Everly Brothers…) et le Quonset des frères Bradley (Patsy Cline, Brenda Lee…) ou encore celui secret de Dan Auerbach (The Black Keys) : le Easy Eye Sound Studio. Après 1h d’attente devant « ce bunker avec barbelés et caméras », l’impétueux est recalé et trompera sa frustration chez les disquaires Grimey’s et The Groove dont « les stocks de vinyles abandonnés et à 1$ sont incroyables ». Assez pour en acheter une cinquantaine (Lee Moses, Irma Thomas, The Staples Singers…), nécessitant ainsi l’achat d’une valise. Pratique, cependant, pour s’accouder en attendant le passage du bus Greyhound, à 5h du mat’, vers Memphis.

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