Article 13 : censure ou révolution ?
Vous avez peut-être (sans doute même) entendu parler de ce fameux “article 13“ (dont le numéro ne cesse de changer – pour en conjurer le sort ?). C’est cette fameuse directive controversée sur les droits d’auteur, débattue et votée au Parlement européen fin mars. “Controversée“, car il y a évidemment du bon et peut-être de quoi s’inquiéter…
D’un côté, c’est la victoire de l’Europe unie (bientôt amputée par son Brexit) à rendre notamment les plateformes de vidéos en ligne responsables de leurs contenus (autrefois elles ne supprimaient que ceux signalés). En les contraignant à s’intéresser au fond, cela permettra sans doute de mieux rétribuer les ayants-droits (compositeur, interprètes…) lorsqu’un extrait de leur musique est utilisé. Après tout, YouTube (propriété de Google) est de plus en plus utilisé comme une radio...
À cela, l’État français souhaiterait ajouter en parallèle une “taxe Gafa“ (acronyme des géants du web : Google, Amazon, Facebook et Apple) sur la publicité en ligne. Objectif : lutter contre l’évasion fiscale, que ces entreprises pratiquent régulièrement.
Le problème, c’est que pour détecter ces contenus protégés, YouTube a mis en place un robot (Content ID). Or, celui-ci est incapable de différencier si l’œuvre est reproduite pour être copiée (ce qui est interdit) ou diffusée dans le cadre d’une parodie ou analyse journalistique (le “droit de citation“ qui, lui, est autorisé). Les vidéos sont donc supprimées ou l’intégralité des revenus sont transférés sans appréciation humaine.
Oh, il y a bien sûr possibilité de faire infléchir la décision, mais après une longue bataille juridique… Mais même dans le cas d’un rééquilibrage au prorata (quid des 10 sec. utilisées dans une vidéo de 40 min. ?) plutôt que l’intégralité, comment prouver que le succès d’une vidéo est dû précisément à cet extrait ?
Cette technique du « rasons les têtes pour se prémunir de l’arrivée de poux » va-t-elle tuer l’exercice critique ? Espérons que sous couvert d’une meilleure redistribution des contenus, la liberté d’expression – dans les limites définies par la loi – n’en soit pas écornée... Ça ne serait évidemment pas la première fois.