Publié par Rolling Stone magazine

TOYBLOÏD : mûrs à queer

À défaut de révolution, la jeune garde grunge française apporte une respiration, (dé)coiffant tout le monde au poteau en déconfinant leur 2e album.


« 26 juin… ? Vous êtes sûrs ? » Loin d’être l’acte fondateur d’une résistance rock, l’appel est tombé comme le signe d’un ras-le-bol... Un tant-pis-si-j’en-crève, davantage le signe d’envie de légèreté qu’un caprice des dieux. De quoi s’attirer les « Oh là » plus que les olas parmi les potos, comme Pogo Car Crash Control. Ces derniers se sont en effet alignés sur une majorité avec une sortie d’album reportée à la rentrée… Celui des Toybloïd commence à dater : 2018. En musique ? Une éternité.

« J’ai un peu l’impression que c’est mon mariage », charrie sa chanteuse d’emblée. Le temps long de la préparation (et ses multiples studios) ; le choix des témoins (au revoir le label !) ; celui du thème (queer) et son visuel (deux comédiennes du burlesque s’embrassant) ; le voyage de noce UK annulé, donnant des fourmis aux poignets… Sans bagues aux dents, la jeune troupe s’impatiente d’aller disputer cette nouvelle balle d’engagement. Et n’a surtout pas attendu la permission pour en envoyer les invitations.
« Les femmes écrivent toujours en réaction, non ? », glisse-t-elle malicieusement, sans jamais indiquer si c’est du larsens ou du coton… Autant que les trois clips (déjà) échappés de l’album – mélangeant lap dance, maquillage pailleté et chambre d’ado – n’en souligne jamais, du premier ou du second, le degré… Confirmation : « Nous fonctionnons autant à l’instinct qu’à l’efficacité ». Et tant pis pour les parts d’inconscient que l’on croyait déceler.

Pour preuve : au 1er album plus festif et dansant, sa revanche s’est écrite « sans cahier des charges »... N’allez pourtant pas croire que l’homosexualité désormais affichée, fil rouge (à lèvres) des textes à la pochette, soit le fait d’une indépendance retrouvée. Certes, celle-ci a permis de limiter les intermédiaires (« de plus en plus nombreux ») et de se recentrer… Mais à l’autonomie de groupe, la chanteuse prétexte plutôt « un cheminement personnel. Comprendre qui nous sommes et la nécessité des représentations Lgbt dans la société (pour rappeler une existence, la possibilité d’une fierté, mais aussi inspirer) résonne chez chacun à différents tempos. Pour nous, c’était le moment... »
Et même si la chanteuse avoue son émotion quand le trio parisien a assuré la première partie de L7, elle ne souhaite pas plus adopter la provocation de ses consœurs ricaines – montrant sur scène leurs poils pubiens ou jetant dans la foule un tampon usagé. « De l’action ? Évidemment. Mais ce sont avant tout des chansons d’amour... Une envie de se défouler, plus qu’à panser ses plaies. J’ai simplement balancer les textes contre le mur pour voir comment ils retombaient… »

Pas étonnant que Toybloïd défende une parité avec Deap Vally, duo féminin US de rock alternatif. À l’économie de moyens, ses voix filtrées et sa basse grinçante, c’est toute une féminité qui s’expose : celle de la nécessité d’en être plutôt que la pose. Tout comme admettre, pour sa chanteuse, avoir vu Cher en guise de 1er concert ; faire un clin d’œil à Rihanna dans l’un des titres ; ou jurer que son père disparu
[Stéphane Sirkis, guitariste d’Indochine] n’y est vraiment pour rien dans les quelques nappes de synthé rajoutées... Au jeu des identités, ce serait effectivement méconnaître le pouvoir de s’assumer.

La liberté ?


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© Eva Quillec

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