AU FIL DU SON 2022, Civray
Pour beaucoup, l’été n’a pas seulement été le signe de reprises d’activités… À l’image du festival du Centre-Ouest de la France : il fut aussi riche en constats, rappels de quelques valeurs oubliées et mea culpa qu’il nous faut ici formuler.
Taille humaine
Sans doute était-ce une conséquence des 7 jours intenses passés lors du Hellfest de Clisson, roi des superlatifs de cette mi-juin ? Du festival Au Foin De La Rue en Mayenne en passant par celui de Guitare en scène en Haute-Savoie, l’impression se déclina en tout cas en fil rouge durant l’été : l’envie de prendre quelques chemins de traverse, à l’ombre des géants et autres automatismes corporatistes. Le désir brûlant (voire caniculaire) de retrouver des jauges accessibles sachant ne pas sacrifier leur contenu et proposant une prévention bien avant les nécessités d’image imposées par les tristes actualités...
Considération et bienveillance, artistes plus abordables et temps suspendu… Il y a derrière ces structures bénévoles des passions sincères, une écoute et une folle adaptabilité, un cadre professionnel facilité (merci à l’adorable attachée de presse de l’étape), voire un engagement injustement sous-médiatisé et à réhabiliter en urgence.
35 000 festivaliers
Ils ne sont donc pas trompés en venant applaudir sur 4 jours Roberto y Gabriela, Louis Bertignac, Vitalic, Danakil ou encore Skip The Use dans un écrin de verdure aux périphéries urbaines, non loin d’Angoulême… Le rassemblement fut joyeux et familial, complété par un off gratuit avec sound systems, structures gonflables, tournois sportifs et espaces bien-être (méditation, yoga, massages…). Merci les partenaires – publics comme privés – maillon essentiel de ces territoires parfois exsangues de culture à l’année, permettant ainsi le maintien de prix affables au sein d’événements dont beaucoup sont hélas déficitaires cette année… La réelle prise de risques est ici.
Et la confirmation donc, sur place, de quelques enseignements et contre-clichés de l’été :
* Jamais nous n’avions assisté à autant de “wall of death“ (foule se séparant pour un poitrail contre poitrail au signal du groupe), en dehors des sphères rock/metal… Preuve que, via cette réappropriation culturelle, le genre redevient enfin tendance, mais aussi – outch ! – du manque de maîtrise par les non-initiés (les metalheads prennent soin de ne pas faire mal, venant le plus souvent en renfort des personnes en difficulté).
* A contrario, il est heureux que le porté par la foule de fauteuil roulant – et son occupant – se généralise enfin au-delà des seules scènes amplifiées…
* Tagada Jones, déjà en prise avec les répercutions pourtant indirectes d’une affaire #MeToo concernant l’un des employés (licencié) de leur tourneur, a su prouver que leur punk-rock – supposé aussi binaire que primaire – pouvait gagner en hauteur, quoi qu’en pensent ses détracteurs… Car ce sont bien 17 personnes (à renfort de percussions sur bidon et instruments à cordes) qui étaient sur scène ce 29 juillet, donnant un relief bienvenu – en plus de contraste dans la programmation.
* Enfin, certains seraient sans doute tentés par quelques ironies face à BigFlo&Oli (une communication officielle trop maîtrisée rattrapant d’anciennes irascibilités, un mega-bus énergivore tout en apparaissant dans un spot pour le ministère de l’Ecologie, chanter que Brel est Français…). Ce serait pourtant vite oublier la finesse de certains de leurs textes, peu souvent rappelée en raison probablement de leur âge... Mais aussi – et surtout ! – la qualité d’un show énergique (dans lequel Oli joue de la trompette et BigFlo de la batterie, excusez du peu !), face à un Orelsan atone qui, certes, n’a jamais été un showman mais dont on attendait mieux du haut de sa stature de l’un des meilleurs vendeurs de disques français.
Preuve, à l’image d’autres petites déceptions de l’été (Stromae, Angel…) et ce malgré le renfort technologique et/ou dansé, qu’un décor ne fait pas tout. Heureusement donc, et à l’image du festival Au Fil Du Son, que priment encore proximité et spontanéité... Et si c’était ça, justement, le « monde d’après ? »