Publié par Blog officiel Rock en Seine

Il fallait en profiter. Profiter du dernier concert du festival. Du remplaçant involontaire d’Amy Winehouse. Du chanteur Mike Skinner... Car ce soir, tout prend fin : l’édition 2008 et l’ultime tournée d’une formation. Mais l’espoir, lui, est toujours là. Et tient le pavé.

Parce que plus que sa musique, l’accent même de son rappeur est tout aussi évocateur. Symbolique. Un accent à couper le fog (brouillard anglais) au couteau. Car Skinner vient de là. De la rue. Des Midlands. De la classe ouvrière anglaise dont il a adopté le phrasé. Précisément cette jeunesse désemparée et sous-estimée. Celle qui doute tous les jours. Celle que l’on nomme les Chavs. Un accent donc, qui suinte l’argot, les expressions imagées et les rimes attentées. Idéal pour habiter un rap évocateur. Tant sur le fond que sur la forme.

Et pourtant, cet accent est souvent imité. Repris par un bon nombre d’acteurs ou de chanteurs anglais. Mais Skinner ne fait pas dans l’exotisme, lui. Il est. Dans le fantasme contemporain d'une société sans classe, le rappeur UK apparaît comme un Oliver Twist moderne. Tout simplement. L’occasion de restituer un quotidien au monde, une réalité volontairement oubliée. Pour les kids, c’est une incarnation à laquelle s’identifier. Une revanche anglaise sur son ère monarchique. Le reflet d’un miroir face à son Histoire victorienne.

Car dans toute société, il subsiste l’idée d’une sous-classe barbare. Perverse. Dangereuse pour la vie placide des élites bourgeoises. C’est l’autre. On ne le connaît pas. Et on s’en méfie. Skinner, lui, rappelle qu’un pays ne doit pas seulement regarder vers ses flux migratoires, mais se poser la question de son propre passé. De sa mémoire collective. De la transmission que cela incombe pour comprendre et ne pas recommencer les mêmes erreurs. Il joue ainsi les poils à gratter, à la manière d’un Ken Loach. D’un sociologue malgré lui.

Sur scène, Skinner transmet donc son histoire de façon sereine et faussement impassible, tel le thé se diffusant dans le lait. La simplicité règne, mais elle est lourde de sens. A l’image de son message. De son public. La foule jump avec lui, comme portée par le groove chaleureux des instruments. L’auteur se permet même un slow langoureux et une reprise railleuse de la grande absente de la soirée. Avant de finir son exposé par un slam torse-nu dans la foule. Parmi les siens. Les gars de la rue.

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