Jeunesse française : l'évolution des publics
On les a longtemps dit timides face à leurs homologues anglais ou américains. Si il est évident que les deux musiques ont un contexte de naissance différent du aux influences géographiques ou à l’actualité sociale, le genre est-il encore actuellement réservé à certaines populations ou communautés ?
> Olivier Granoux (Rolling Stone)
« Le rap s'inspire du groove, le rock de l'énergie. Mais attention, le clivage est dangereux. Et plus le temps passe, plus on trouve du rock qui groove et du rap qui tabasse. Le rap a un côté canaille, c'est le son de la rue et le modèle américain. Le rock refuse le système à la base. Si les punks veulent casser les villas des bourgeois, les rappeurs rêvent plutôt d'y habiter. A la base, ces musiques sont celles de la contestation. Un concept qu'elles semblent avoir majoritairement oublié aujourd'hui. On ne fait pas forcément de la musique parce qu'on a quelque chose dans les tripes à sortir, mais plutôt pour être célèbre, avoir de l'argent et une vie facile. Artistiquement, c'est forcément casse-gueule. Fini le temps des 60 ans de carrière de Johnny Hallyday. Aujourd'hui, un type qui sort trois albums, c'est déjà un survivant. »
> Matthieu Beauval (Le Mouv’)
« En leur temps, même les Beasties Boys ou Cypress Hill réalisaient des titres velus. The Good, The Bad & The Queen prouve que l’on peut s’entendre sur un message (Blur, Clash, The Verve et Tony Allen). Félicitons-nous aussi car il est encore interdit de dire « Fuck » en Angleterre. Ici, le discours est toujours revendicatif, mais plus construit. »
> Laurent Bouneau (Skyrock)
« Le rap est une expression, le rock une musique. Les deux symbolisent le même changement avec des moyens opposés. La différence c’est que les rappeurs ont intégré les principes du système économique Si Philippe Manœuvre prétend que Joey Starr est le dernier rockeur, c’est avant tout un état d’esprit, mais c’est surtout un effet d’annonce pour son livre. De toute façon, le spectre est large ! Même Justin Timberlake puise ses influences dans Prince ou Mickael Jackson. Aux Etats-Unis, on voit l’influence grandissante du reggaeton de l’Amérique Latine. On peut comparer ce phénomène en France avec le raï : c’est l’affirmation d’une identité dans un ensemble. Pour l’instant, c’est le slam qui cartonne, alors que le berceau est américain. C’est dû à notre tradition littéraire et ça nous donne l’occasion que des rappeurs comme Abdel Malik ne recherche pas le rêve matériel et peuvent aussi être altermondialistes. »
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> La guerre des ondes ?
> Quel avenir pour la révolte ?