Les indie games sauveront-t-ils le jeu vidéo ?
Un jeu intelligent et innovant, tout le monde en a rêvé. D’autant plus quand il n’est pas accompagné d’une lourde propagande publicitaire qui vous force à l’acheter pour ne pas jouer le rôle de l’intrus. Les éditeurs indépendants, eux, l’ont fait. Et certaines de leurs sorties ont dors et déjà fait trembler quelques géants du genre. Dans cette arène acharnée, reste à savoir si c’est la force qui vaincra de l’intelligence... On prend les paris ?
Trois principales plateformes en ligne se sont lancées dans le téléchargement de jeux moyennant des prix allant d’environ 5 à 15€. Microsoft, pionnier de ce système d’échange, a dégainé le premier avec Xbox Live Arcade. Ce terme désigne tous les mini-jeux en ligne disponibles sur la Xbox et la Xbox360. A part quelques exceptions, l’ensemble des titres sont payants et téléchargeable sur le réseau. Deuxième plateforme du genre : la PlayStation Network (PSN), celle de Sony et de sa PS3. Elle permet de jouer en réseau, d’accéder à la boutique en ligne PlaystationStore et accueille depuis le printemps 2008 son projet Home, un univers virtuel élaboré par les créateurs d’EverQuest. Enfin, le dernier né est la WiiWare de Nintendo. Accessible depuis la chaîne boutique de sa console Wii, elle permet depuis le 20 mai 2008 en Europe d’acheter des jeux téléchargeables par l’intermédiaire de points. Seule contrainte technique des développeurs, la réalisation d’un jeu de moins de 40 Mo. Il n’en fallait pas plus pour voir émerger de nouvelles passions…
La voie est donc toute tracée pour les éditeurs de jeux indépendants, créant une réelle économie parallèle en marge des grosses sorties. Et pas des moindres à en juger les chiffres croissants du nombre de téléchargements, notamment ceux sur les téléphones portables (le futur eldorado, nous promettons). Car, avant même le plaisir des joueurs, les jeux indépendants ont un rôle crucial à entreprendre auprès des grosses majors. En effet, l’intégration de ces jeux accroît considérablement l’offre en étoffant le catalogue de licences. Il favorise également le maintien d’une actualité et espace les sorties de blockbusters. Enfin, avec la disparition du métier d’éditeur, le faible poids informatique de la majorité des sorties permet une grande adaptabilité sur de nombreux supports.
Exemples
Des jeux indépendants connus et distribués par des consoles de salon, il en existe plus qu’on ne pourrait le supposer. Sur PS3 et PC, Everyday Shooter s’est beaucoup fait remarqué. Même diffusion pour flOw, l’un des titres les plus emblématiques du milieu indépendant, issu de la start-up de Jenova Chen et financé par le Santa Monica Studio (Sony). Le cas de Toki Tori est aussi symbolique pour Nintendo. Développé par Two Tribes, le jeu GameBoy Color avait été un échec commercial. Il a nécessité 5 à 10 personnes pour que le petit poussin se refasse une santé sur WiiWare. Distribué aussi par Nintendo, les Anglais de Frontier ont participé aux débuts de la plateforme avec le concept de Lost Wings, un jeu basé sur les vents et les éléments de la nature (arbre, eau, feu). Côté Microsoft, il faut compter sur N+. Les créateurs, Mare Sheppard et Raigan Burns, ont été approchés par le géant informatique suite à la présentation de leur ébauche au Independant Games Festival 2005. Microsoft avait alors voulu que les auteurs montrent la puissance de calcul et de haute définition de la Xbox 360, mais les développeurs ont tenu bon. Preuve, une fois encore, du consensus perpétuel dont doivent faire preuve les indépendants, même si une adaptation est toujours nécessaire (type d’interface, classements en ligne, etc.) pour permettre d’être diffusé par l’un ou l’autre.
Mais la véritable star est incontestablement le jeu de plateforme expérimental Braid, disponible sur Xbox 360. Selon les estimations du site Internet VGChartz, il aurait vendu plus de 28 000 copies en seulement 3 jours, devenant ainsi le second démarrage le plus rapide de l’histoire du Live Arcade juste derrière Geometry Wars 2. La presse est aussi emballée, avec une note moyenne de 93% chez Metacritic, calculée d’après 25 tests dont 1Up, Gamespot, Eurogamer ou Edge. Mieux, le titre culmine désormais le top 10 général des jeux Xbox 360 plébiscités par la critique, aux côtés de Call of Duty 4, Halo 3, Guitar Hero II ou Rock Band. Braid est actuellement vendu par Microsoft pour 1 200 points (soit 14,40€), 400 points de plus que la majorité du catalogue. Jonathan Blow, son créateur, a déclaré au site canadien GameFocus qu’une version PC est même prévue cette année, ainsi qu’une probable adaptation sur Playstation Network, une fois la période d’exclusivité terminée. Rien de prévu par contre sur WiiWare. Et fidèle à son esprit d’indépendant, Jonathan Blow a déclaré au magazine Gamasutra qu’aucune suite ne serait envisagée, qu’elle que soit les ventes de son jeu. Bel esprit.
Distinctions
L’Independent Games Festival (IGF) de San Francisco est le principal événement annuel qui récompense les jeux vidéo innovants, dont la production a été assurée par des développeurs de jeux vidéo indépendants. Fondé par Gama Network, cette compétition se déroule pendant la Game Developers Conference, s’inspirant de son équivalent cinématographique le Sundance Film Festival. Les gagnants de cette année sont : Crayon Physics Deluxe (Grand Prix), Iron Dukes (Navigateur), World of Goo (Game Design et Technique), Fez (Visuel Art), Audiosurf (Audio et Public), Desktop Tower Defense (Jury), Skyrates (Jury), Quadradius (Jury) et Synaesthete (Etudiants).
Le site Internet Game Tunnel a lui aussi établi le palmarès des 10 meilleurs jeux vidéo indépendants. Une manière de rappeler qu’il ne suffit pas d’une compétence graphique à toute épreuve ou du recyclage à outrance pour recueillir les louanges de la presse. Ici, et ce malgré certains titres qui culminent faiblement les 3h de jeu, c’est la suprématie de l’idée qui prime. L’innovation est au centre de l’action, principe malheureusement oublié par certaines grandes firmes. Pour preuve, l’éditeur Chronic Logic et son Bridge Construction Set qui, après avoir construit un pont, doit supporter les trains ou l’autoroute qui passe dessus. Citons également Virtual Villagers, un jeu de simulation où il vous faut sauver les habitants d’une île déserte qui vaguent à leurs tâches jour et nuit et où vos interventions les obligeront à ne pas se manger entre eux. A vous donc le tamagotchi humain... Enfin, l’utilisation de jeux indépendants par les majors permet de ne pas jouer son avenir sur la sortie d’un ou deux titres qui ont pris plus de 3 ans de développement. Rappelons-nous du désormais regretté studio Clover, créateur de Viewtiful Joe et Okami…
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