Publié par Cinextenso

Désireux de vouloir porter l’engouement pour les productions asiatiques au grand public, le film Shinobi arrive enfin en France après avoir exploré l’Allemagne en décembre dernier. Au programme, une love-story passionnelle sur fond de combats passionnés, en plein médiéval japonais...

Autant emporte le vent
Au 17ème siècle japonais, le pays est unifié par les Shoguns, sorte d’équivalent des cardinaux Mazarin ou Richelieu. Deux familles ninja y sont les garants de l’art shinobi, un des derniers vestiges du passé belliqueux national. Un art meurtrier et caché aux propriétés surnaturelles. Afin de mettre fin à la rivalité ancestrale des deux clans (Iga et Koga), le Shogunat ordonne un combat à mort entre les cinq meilleurs guerriers des tribus, au terme duquel sera désigné l’héritier du royaume. Hors les deux prétendants légitimes, Oboro et Gennosuke, sont en réalité secrètement amoureux. Il leur faudra alors choisir entre l’honneur ou l’amour.

Un budget conséquent
Pour les néophytes du genre, le film a de quoi faire sourire et être rapidement rangé du côté du rayon Bollywood. Une soirée agréable à passer entre amis ou geeks, chips dans la main et bulles dans le gosier. Pour preuve, le très large emprunt à Roméo & Juliette, le sens de l'honneur exacerbé, certains effets spéciaux douteux du Pacte des Loups (pas la majorité heureusement) et les pouvoirs X-Men de chacun des protagonistes en pleine Ere Tokugawa… Mais c’est sans compter sur l’appétit insatiable des asiatiques pour les ralentis, les clichés, les silences et les affrontements en vol alors que le film ne parle justement que de ce changement vers la modernité. Dommage pour la réflexion. L’idée d’ancrer les péripéties au point même où bascule l’Histoire était suffisamment alléchante pour que l’on s’y attarde plus. Le Japon est toujours à l’heure actuelle prisonnier de ses traditions et de ses croyances, tout en maîtrisant à son autre extrémité les toutes dernières technologies mondiales.

Pas de surenchère
Si l’introspection et l’initiation par le voyage ne sont pas suffisamment exploitées, l’opposition constante entre l’action et l’inaction fait par ailleurs rage. Même les couleurs des tribus nous jouent subtilement le coup du miroir opposant le feu et l’eau, les femmes et les hommes, le palais impérial et les cahutes de la montagne. On comprend mieux alors l’attirance à peine dévoilée de Shimoyama Ten pour les jeux vidéos et l’exploitation qu’il en avait fait dans « Otogiriso ». Les effets spéciaux lorgnent peut-être davantage sur les jeux d’arcade, mais les déplacements sont eux très réussis. Sur les troncs d’arbres ou dans les airs, les drapés sont efficaces sans vraiment abuser du style. On se console alors avec un divertissement qui ne fait heureusement pas dans la surenchère mais qui nous prive d’un réel affrontement final au profit des sentiments. Au moins l’habituelle leçon de morale est épargnée et c'est un audacieux coup du distributeur Kaze qui est à saluer.

Mieux que les chinois
La grande réussite des japonais ici reste l’utilisation de thèmes universels : l’amour impossible, l’honneur et le combat fratricide. Une avancée sur leurs homologues chinois qui perpétuent la tradition du film en costume avec des valeurs qui restent malheureusement nationales. Sans être une grande révélation, Shinobi reste un film honnête qui se laisse regarder un sourire en coin. Reste désormais à produire un juste milieu entre recyclage et hommage, influence et originalité, technologie contemporaine et réalisme.

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