Publié par Frenetic Arts


300 millions de dollars et près douze ans de recherche ont permis la sortie de cette fresque surdimensionnée qui porte - définitivement - bien son nom. Choc visuel ? Non, mais une série B agréable. Car, si révolution il y a, elle n’est pas dans ce qu’elle inaugure, mais plutôt dans ce qu’elle parodie ici.

 

Avatar.jpgQu'on se le dise : oui, le film est beau et le réalisme incontestablement bluffant. Mais bien qu’annoncé à grand renfort de publicités, le dernier film de Cameron échoue précisément là où il est censé aussi nous émerveiller : son originalité. Jeux vidéos, bandes dessinées (Aquablue), panthéisme miyazakien... Pour ceux qui seraient tentés de l’oublier un peu rapidement, l’univers d’« Avatar » a déjà été exploité par d’autres, constituant ainsi un patchwork sans aucune audace, quoi que divertissant. De ses emprunts les plus malhabiles, le film vaut malgré tout le coup d’oeil pour sa faune nocturne et ultra-violette eighties, que la Muzak world ambiante ne parvient pas à dénaturer. Idéal pour un public peu exigeant qui préfére se contenter d’un emballage pourtant trompeur.

Problème : en 12 ans de recherche, il était possible de travailler sur un scénario plus épais que la fable simpliste et populiste que le film laisse entrevoir sans peine. Passe les ressemblances plus que troublantes du pitch avec la nouvelle « Call Me Joe » de Paul Anderson (Cameron avait déjà été au centre d’une histoire de plagiat lors du premier « Terminator »), les ficelles du film se font grossières, enchaînant les événements sans rebondissement, ni surprise. Et même si cette conquête de l’Amérique inversée reste un prétexte à l’exploration de ce nouveau monde, le conte écolo échoue dans le fait d’installer une véritable mythologie. Difficile d’imaginer une suite, tant l’histoire se contente de rester en surface, sans tisser de liens parallèles. Les Na’vis ne sont que des indiens, avec tout l’attirail qui va avec : importance de la nature, décalage technologique, occupation de territoires, voire même des arcs et des flèches (Là encore, l’originalité blesse). Quant à la trame, elle édulcore « Danse avec les loups » et « Pocahontas »... Bref, scénariquement, le véritable génie de Cameron réside dans l'anticipation d'un revival new age, post-11 septembre.


Avatar-film.jpgCôté acteur, l’emploi de Zoe Saldana résume à elle seule le film : une plastique parfaite, mais un jeu un brin caricatural. La même qui habite le méchant-méchant militaire et sa pléiade de dialogues sévèrement burnés, dignes des plus grandes séries B. Quant à la reconversion illico-presto du gentil-gentil marine, elle démontre définitivement l’absence de psychologie des personnages. A l’inverse, Sigourney Weaver s’en sort, mais davantage par son aspect symbolique. Elle, qui avait affronté les Aliens, se retrouve désormais à les défendre. D’ailleurs, fait étonnant à noter : ces magnifiques Na’vis de synthèse révèlent une réelle part d’humanité dans leur jeu d’acteurs grâce au réalisme des effets spéciaux, quand l’armée et le lobbye industriel (élément également exploité dans la saga « Alien ») se déshumanisent de ses valeurs pour jouer les clichés. La machine plus forte que l'homme ? Peut-être la vraie morale du film, tant certains décors vertigineux font oublier la futilité des échanges.


Avec « Avatar », James Cameron tente de nourrir son appétit insatiable des records et du spectacle. Faire toujours plus dans la démonstration, agiter le chiffon du magicien, plutôt que renforcer et appuyer un réel talent d’auteur. Résultat ? Du divertissement sans épaisseur qui alimente une vitrine rutilitante, déjà remplie par les possibilités de merchandising et d’Oscars. Un film du dimanche soir HD, en guise de Disneyland coloré. Agréable. Divertissant, certes. Mais même la révolution de la décennie précédente - Jurassic Park - faisait part d’un peu plus de substance qu’une simple démonstration technique en devenir. Au fond, le principe de l’avatar (sorte de métempsychose / transfert des corps) reste une idée malheureusement pas assez exploitée. En conclusion, le film annonce surtout, et malgré lui, l’arrivée d’un cinéma mutant, sorte d’élan collectif où le spectacle peut se substituer à la volonté légitime de ne pas vouloir être pris pour un simplet. Comme si « film d’action », aussi magnifique soit-il, devait obligatoirement s’abaisser à la facilité. Car, c'est sûr, la révolution est bien ailleurs... Et à commencer par la disparition de ces disgracieuses lunettes 3D.

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